Table des matières
Les nouvelles causes de dissolution des sociétés (2/2)
Dans notre article précédent, nous avons examiné la première cause de dissolution à savoir le non dépôt des comptes annuels.
Nous renvoyons le lecteur à cet article pour obtenir plus d’informations sur les raisons et les objectifs de la réforme entreprise par le législateur.
Dans le présent article, nous examinerons les grandes lignes des trois nouvelles causes de dissolution prévues par le législateur dans le nouvel article 182 du Code des sociétés (CDS).
Ces trois nouvelles causes de dissolution impliquent impérativement qu’un dossier soit communiqué par la chambre des enquêtes commerciales. Dans ce cas, le Tribunal pourra soit accorder un délai de régularisation, par lequel il renvoie le dossier à la chambre d’enquête commerciale qui en assure le suivi, soit prononcer la dissolution de la société.
Ces nouvelles causes de dissolution ne pourront donc qu’être invoquées par la chambre des enquêtes commerciales et donc pas par un tiers intéressé ou le Parquet.
Ces trois causes de dissolution sont :
1° quand cette société a été radiée d’office en application de l’article III.42, § 1er, 5°, du Code de droit économique
L’article III.42, § 1er, 5°, du Code de droit économique prévoit la radiation d’office de la société de la Banque Carrefour des entreprises (BCE) dans le cas où cette société rempli, de manière cumulative, les critères suivants:
a) elles ne disposent, depuis au moins trois ans, ni de qualités, ni d’activités, ni d’unités d’établissement actives inscrites dans la BCE;
b) elles sont inscrites dans la BCE comme ayant un statut actif;
c) elles ne disposent pas de demandes d’autorisation ou de qualité, en cours, inscrites dans la BCE;
d) elles n’ont effectué, depuis 7 ans, aucune modification relative aux données inscrites dans la BCE;
e) elles n’ont effectué, depuis 7 ans, aucune publication, autre que celle des comptes annuels, dans les Annexes du Moniteur belge ou au sein du Moniteur belge.
La radiation est une mesure administrative qui devient, au sens de l’article 182 du Code des société un motif de dissolution.
2° si malgré deux convocations à trente jours d’intervalle, la seconde par pli judiciaire, elle n’a pas comparu devant la chambre d’enquête commerciale.
Ainsi que le prévoit l’article 12 de la loi sur la continuité des entreprises, la chambre d’enquête commerciale suit “la situation des débiteurs en difficulté en vue de favoriser la continuité de leur entreprise ou de leurs activités et d’assurer la protection des droits des créanciers.” Pour remplir cette mission, les chambres d’enquêtes commerciales peuvent “appeler et entendre le débiteur afin d’obtenir toute information relative à l’état de ses affaires et au sujet des mesures de réorganisation éventuelles.”
Concrètement, la chambre d’enquête commerciale convoque la société pour l’entendre sur tel ou tel manquement qui lui est reproché. Passé un délai de 30 jours, la chambre d’enquête commerciale pourra re-convoquer la société par pli judiciaire.
Si la société ne donne toujours pas suite à cette convocation, la chambre d’enquête commerciale pourra rédiger une décision de renvoi qui saisira le Tribunal. Celui-ci devra, à son tour, convoquer la société à l’audience et prononcera sa dissolution si celle-ci est toujours défaillante.
3° si les administrateurs ou gérants ne disposent pas des compétences fondamentales en matière de gestion ou ne disposent pas des qualifications professionnelles imposées pour l’exercice de son activité par la loi, le décret ou l’ordonnance.
Cette cause de dissolution implique une démarche encore plus active de la chambre d’enquête commerciale. En effet, elle devra examiner l’activité de la société et les éventuelles conditions nécessaires à son exercice. Ce travail implique une connaissance particulière des conditions d’accès pour chaque activité ce qui, à notre estime, variera fortement en fonction du type d’activité de la société.
Une dernière précision est que ces trois nouvelles causes de dissolution ne pourront toutefois “être prononcée aussi longtemps qu’une procédure de faillite, de réorganisation judiciaire ou de dissolution de la société est pendante.”
Conclusion
Cette réforme dote les chambres d’enquêtes commerciales de nouveaux outils pour pouvoir veiller aux intérêts des créanciers puisque comme nous l’avons vu précédemment, les sociétés “dormantes” ou “fantômes” sont parfois utilisées à des fins contraires aux intérêts des créanciers dans la mesure où certains dirigeants pourraient racheter une société “coquille-vide”. Cela permettrait de détourner la finalité des règles sur la capital social, notamment, soit par des dirigeants ne disposant pas des compétences en matière de gestion ou des qualifications professionnels.
A priori, cette réforme permettra de gagner en efficacité dans la lutte contre ces sociétés “dormantes”. Seul le temps nous permettra de constater les résultats de cette réforme, encore faut-il que les chambres d’enquêtes commerciales disposent de moyens humains suffisants pour mettre en œuvre cette nouvelle disposition.