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La PRJ au secours des entreprises après la crise du Covid-19?
La crise du Covid 19 a un impact sur l’économie et les entreprises. Dans cet article, j’examine l’opportunité, pour une entreprise, d’introduire une procédure de réorganisation judiciaire (PRJ) ainsi que les diverses mesures mises en oeuvre par les autorités.
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Le Conseil national de Sécurité belge s’est réuni le 24 avril 2020. Des mesures de déconfinement sont envisagées à plus ou moins bref délais puisqu’on parle déjà de la date du 4 mai comme début du déconfinement pour certains secteurs.
Nous savons que ce déconfinement sera progressif et qu’il se déroulera très certainement en plusieurs phases.
Le retour à la normale n’est pas pour tout de suite mais les difficultés annoncées au début de la crise du Covid-19 commencent à se matérialiser au fil des jours dans le chef de plus en plus d’entreprises.
Certains ont tenu bon grâce à un excédent de trésorerie et ont réussi à jouer aux équilibristes entre les frais fixes, les factures et le personnel mis au chômage. Malheureusement la reprise économique ne va pas nécessairement être immédiate et votre entreprise ne tiendra peut être pas le coup d’ici là.
L’Etat a pris conscience de la situation et a tenté de trouver des solutions. Certains sont satisfaits, d’autres sont déçus. Malheureusement et dans tous les cas, l’entreprise doit faire avec et être maître, autant que possible, de son destin, en prenant “le taureau par les cornes”.
1. Des mesures insuffisantes pour les entreprises durant la crise du Covid19?
Parmi les mesures, nous pouvons en distinguer de trois types à savoir des mesures de soutien, des mesures d’aides et des mesures de protection.
Les mesures de soutien permettent aux entreprises, qui en font la demande, de bénéficier d’un étalement de paiement, d’une réduction ou d’une dispense de paiement. Les conditions ont été assouplies et la crise du Covid-19 est considérée dans bon nombre de circonstances comme un cas de force majeure ce qui juridiquement a des conséquences.
Parmi ces mesures de soutien, différentes facilités de paiement ont pu être sollicitées par les entreprises durant le confinement pour limiter “la casse” à savoir, par exemple:
- Plan de paiement, dispense ou réduction temporaire des cotisations sociales
- Plan de paiement de la TVA
- Plan de paiement du précompte professionnel
- Plan de paiement pour l’impôt sur le revenus (IPP/ISOC)
- Moratoire de paiements pour les crédits en cours
- Chômage temporaire ou partielle
- …
Si vous n’avez pas encore sollicité ce type de mesures, il est encore temps et il faut réagir rapidement puisque pour certaines d’entre elles, les demandes doivent être introduites avant le 30 juin 2020.
Voir les infos ici et là.
Les mesure d’aides sont des mesures où l’entreprise va percevoir, sous certaines conditions, un revenu ou indemnité forfaitaire de l’Etat.
Ainsi, la Région Wallonne accorde, sous certaines conditions, une indemnité forfaitaire de 5.000 € pour les entreprises touchées par la crise du Covid-19. Le Fédéral a mis en place également des mesures de soutien aux entreprises en élargissant le droit d’accès au droit passerelle (voir l’article sur le sujet ici).
Enfin, les mesures de protection sont des mesures prises par les autorités pour protéger véritablement les entreprises de ses créanciers. L’arrêté royal n°15 du 24 avril 2020 règle une série de situations et met en place un véritable sursis pour toutes les entreprises en difficulté.
Toutes les entreprises dont la continuité est menacée par l’épidémie de COVID-19 et ses suites et qui n’étaient pas en état de cessation de paiement à la date du 18 mars 2020, bénéficient d’un sursis temporaire jusqu’au 17 juin 2020 inclus.
Ce sursis signifie que les entreprises sont protégées temporairement contre la faillite, les saisies et la résolution de contrats pour cause de non-paiement.
Concrètement, le sursis est automatique pour les entreprises qui sont dans le champ d’application de l’arrêté royal. Les saisies exécutoires mobilières sont suspendues ( les immeubles peuvent toujours être vendus)
L’arrêté royal prévoit que la date du 17 mai pourra être modifiée par un nouvel arrêté royal. Il y a donc fort à parier que cette date sera reportée pour permettre aux entreprises de se remettre de cette crise sanitaire.
Cependant, il est possible que certaines entreprises ne parviennent pas à “tenir le coup” après la crise et le déconfinement car elles auront accumulés de trop grosses pertes.
La meilleure chose à faire est d’envisager la suite très rapidement avec des professionnels et profiter du sursis accordé par l’Etat pour préparer l’avenir.
Ma présentation sur le sujet :
[slideshare id=233506916&doc=covid-19entreprises-200510103758]
2. La PRJ : une solution miracle pour l’entreprise après la crise du Covid19?
On constate depuis quelques temps que la presse mentionne de manière régulière la procédure de réorganisation judiciaire comme solution à tous les problèmes des entreprises (en abrégé PRJ – voir la page relative à la PRJ ici).
La PRJ est effectivement un outil très intéressant pour sauver une entreprise car il est notamment possible de proposer un plan de remboursement à ces créanciers d’une durant de 5 années et pouvant aboutir à des abattements de créances de 80% dans certains cas. Face à ces mesures particulièrement forte, le législateur a cependant bien encadré l’entreprise qui sollicite une PRJ par de règles de procédure très strictes et des subtilités que certains professionnels peuvent encore omettre.
Parmi les question à se poser, le timing revient couramment. La question à laquelle vous devez répondre est de savoir quand il faut introduire la PRJ. Quel est le “meilleur” ou le “moins mauvais” moment pour faire la demande?
Il faut bien comprendre que la requête introductive d’une PRJ requiert, à peine de nullité, une série d’éléments visés dans la loi. Il est donc plus que conseillé de se faire aider par un spécialiste de la PRJ en plus que d’un professionnel du chiffre (la loi impose l’aide d’un professionnel du chiffre (comptable, expert-comptable, etc.) pour la rédaction de certains documents).
Par ailleurs, dans la mesure où toute PRJ va permettre à une entreprise de bénéficier d’un sursis, il est primordial de réfléchir à la mise en oeuvre de cette PRJ car le sursis n’a d’effet que sur les dettes postérieures à l’ouverture de la PRJ et ce, peu importe l’objectif de la PRJ (accord collectif ou transfert sous autorité de justice).
Pour le dire simplement, introduire une PRJ pour quelques dettes uniquement n’apparaît pas être une bonne solution avant d’avoir au moins tenté de négocier avec ses créanciers.
Comme le dit l’expression consacrée, “il vaut mieux un tien que deux tu l’auras”. La recherche d’un accord win-win est nécessaire pour permettre à chaque entreprise de poursuivre ses activités dans les meilleures conditions.
A ce sujet, l’appel, à nouveau, à un professionnel permettra à votre entreprise de mettre en exergue les éléments importants à intégrer dans cette négociation et vous permettra également d’obtenir une analyse transversale de votre entreprise car dans certaines situations d’autres solutions pourraient être proposées par votre conseil que la PRJ.
Si malheureusement les négociations n’aboutissent pas à un accord viable, la PRJ pourrait être la piste à envisager pour sauver votre entreprise. La presse a, à cette occasion, interviewé plusieurs magistrats pour savoir si les “conditions” seront plus souples.
A mon sens, la seule condition de fond à remplir est que la continuité de l’entreprise soit menacée, à bref délai ou à terme. Cette condition ne peut pas être assouplie et on peut espérer une certaine souplesse des magistrats sur les conditions de formes à respecter (documents à joindre à la requête).
Je me répète mais n’hésitez pas à faire appel à un professionnel pour envisager toutes les possibilités car la situation d’une entreprise est souvent truffée de spécificités. Je pense notamment à des cautionnements personnels d’administrateurs, des sûretés concédées qui doivent être prise en compte dans l’évaluation des pistes pour sortir de cette crise.
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